Quels que soient les termes employés, précoce, zèbre, haut potentiel, doué, surdoué la question qui se pose n’est pas tant celle de l’intelligence mais comment s’y prendre lorsque l’on doit vivre avec cette singularité. Comment accompagner cette étrangeté que l’on ressent au plus profond de soi et que l’on n’ose avouer ? Comment concilier ce que l’on ressent avec ce que l’on perçoit de la réalité ? Comment ne pas se perdre dans les comment et les pourquoi ou l’art et la manière de chercher des réponses là où naissent toujours et encore d’autres questions ? Comment expliquer, s’expliquer sans se perdre davantage en lisant l’incompréhension dans le regard de l’autre ?

Mon parcours personnel et mon expérience professionnelle m’ont appris toute la difficulté et la complexité de se sentir différent dans un monde où la norme est un gage d’intégration, d’acceptation et de reconnaissance. Mais comment intégrer et accepter un monde où tout semble étrangement codifié ? Mais pourquoi donc les normes véhiculées par nos sociétés sont-elles si difficiles à supporter lorsque l’on est précoce ? Sans doute, parce le précoce est en permanence à la recherche de sens...d’un sens, pour lui, dans la vie. Or, la plupart du temps, dans les codes sociaux, à l’école ou dans la vie professionnelle, les rapports sont régis par des règles. L’individu se trouve face à des règlements dont les fondements lui sont rarement expliqués, parfois arbitraires ou encore fruit d’us et coutumes avec une longue histoire derrière. Le jeune précoce, très intuitif et avide de sens, n’admet pas cette non cohérence immédiate, elle le touche directement et cruellement...

Dans les caractéristiques des précoces l’hypersensibilité et l’hyperémotivité vont parfois alterner avec une « forme d’indifférence ». Dans tous les cas, il sera bien difficile pour l’entourage de comprendre que les expressions, les ressentis du précoce sont tout autant singuliers et paradoxaux que leurs interrogations et leur façon d’appréhender le monde.

A peine trois ans et déjà le monde l’interroge, l’interpelle dans un flot de pourquoi. Dans un langage fluide et un vocabulaire approprié, il décontenance par la justesse de ses propos et sa facilité à percevoir et à ressentir le monde qui l’entoure. Il est étonnamment présent et la seconde d’après comme perdu, déjà...dans ses pensées. Mais voilà, alors qu’il comprend la course des planètes et reconnaît aisément les dinosaures, il se trouble et bascule dans un désespoir profond  à l’idée que Bambi n’ait plus de maman, s’agite et s’énerve dès qu’il doit interrompre ce qu’il fait, s’émeut et se met dans une colère démesurée parce qu’il ne trouve plus...ce petit bout de bois....ou de caillou, ramassés il y a quelques mois.

La précocité est un état singulier et complexe où les pensées s’enchaînent à un rythme effréné, où les émotions et les sensations sont exacerbées en permanence. Il est important d’apprendre à connaître et à décrypter son fonctionnement pour mieux l’accepter afin qu’il devienne une force vive faite de douceurs et de compréhension pour aborder tous ses méandres étonnants.